Histoire et diplomatie/Storia e diplomazia


Mémoire concernant les frontières de
France, Savoie, Piémont
pour servir d'instruction
tant pour le campement des armées que pour les faire manoeuvrer
(par de La Blottière)




- Liste des villages, cols et hameaux




Annotations de H. Duhamel pour la réédition en 1891
de l'étude publiée en 1721 par de La Blottière

Introduction  
    Une description générale, relativement précise, des passages des Alpes mettant en communication la Haute-Italie avec la France, a été publiée à Paris en 1507, par Eustache de Brie, à la suite de la Chronique de Gennes, avec la totale description de toute l'Italie. Son auteur Jacques Signot, qui accompagna en Italie l'armée de Charles VIII, en fit imprimer à Paris, en 1515, par Toussains Denis, une deuxième édition accompagnée d'une curieuse carte dont la partie intéressant la frontière française a été rééditée par les soins de M Merceron-Vicat, dans l'Annuaire de 1884 de la Société des Touristes du Dauphiné.
    En 1683, Borgonio, ingénieur Piémont publia une carte (à l'échelle du 150,0000 environ) offrant en réalité la première représentation topographique sérieuse de cette même région des Alpes. De nouvelles éditions de cette carte parurent en 1763 et en 1772, alors que Hubert Jaillot, géographe du Roi, l'avait déjà copiée pour rédiger en partie à une échelle voisine du 200,000e, sa carte des Estats de Savoye et de Piémont. Le Dauphiné, la Bresse, etc., publiée en 1706. Nous ne citerons que pour mémoire les diverses cartes ou documents topographiques que T. de Beins, G. Blaeuw, J. Boisseau, G. de l'Isle, de Fer, Hondius, Janssonius, Merian, Ottens, le Père Placide, Sanson, Tassin, Tillemon, R. de Vaugondy, etc. éditèrent soit au XVIIe siècle, soit au commencement du XVIIIe. L'intérêt présenté par ces documents n'exsiste guère qu'au seul point de vue des noms de lieu qui y sont mentionnés.
    L'ingénieur ordinaire du Roi, La Blottière, né en 1673, mort maréchal de camp à Montpellier en 1739, fit une étude approfondie des massifs alpins du Dauphiné, de la Savoie et du Piémont. Pendant que l'ingénieur-géographe Roussel exécutait (1710) à des échelles voisines du 50,000e, diverses cartes du Dauphiné et de ses frontières du côté de la Savoie et du Piémont, la Blottière (qui seconda cet ingénieur dans la rédaction de la remarquable carte des Pyrénées, parue en 1730 sous la seule signature de Roussel) dressait à l'échelle du 72,000e, la "carte du Briançonnais, de l'Embrunnais, des vallées de Cézanne, de Bardonnèche, d'Oulx, d'Exilles, de Chaumont, de Pragelas, de Suze, de Pérouze, de Saint-Martin, d'Angrogne, de Luzerne, de Château Dauphin, du Pô de la Maïra, et d'une partie de la vallée de Barcelonnette".
    Plus de trente mémoires de la Blottière, relatifs à cette partie des Alpes sont conservés dans les archives du dépôt de la guerre et du dépôt des fortifications.
    Le mémoire daté de 1721 que nous éditons ici forme un résumé complet des connaissances générales que l'éminent collaborateur de Vauban pu recueillir sur le terrain même pendant ses nombreux voyages à travers les montagnes du Dauphiné, de la Savoie et du Piémont, pour réunir les documents nécessaires à l'établissement de sa carte, dont l'exactitude a malheureusement été sacrifiée à l'effet artistique d'ailleurs très remarquable.
    La partie de ce mémoire de La Blottière, relative à la campagne de la succession d'Espagne dans les Alpes (1707-1713) a été éditée par les soins de M le lieutenant-colonel de Rochas d'Aiglun, dans le Bulletin de la Société d'Etudes des Hautes-Alpes en 1888. Aujourd'hui nous publions l'ensemble de ce mémoire dont la partie descriptive a été reproduite presque textuellement dans tous les ouvrages composés depuis sur le même sujet (Topographie militaire de la frontière des Alpes, par M de Montannel, éditée par M le lieutenant-colonel de Rochas d'Aiglun, page XII), entre autres dans l'histoire des campagnes de M de Maillebois, rédigée par le marquis de Pesay, ouvrage dont le général en chef Dumas fit extraire et réimprimer à Grenoble, le 20 germinal an IIè, pour l'usage des Officiers et Soldats employés à l'armée des Alpes, une plaquette comprenant "les noms, situations et détails des vallées de la France le long des grandes Alpes, dans le Dauphiné et la Provence, et de celles qui descendent des Alpes en Italie, depuis la Savoie, jusqu'à celle de Saint Etienne au Comté de Nice."
    Nous pensons que ces quelques notes expliqueront l'intérêt que présente la publication du mémoire de la Blottière ce précurseur de l'ingénieur de Montmmel et du lieutenant-général de Bourcet dont les travaux sur la Frontière Sud-Est de la France sont si justement appréciés par tous ceux qui connaissent et étudient l'histoire militaire et la topographie des Alpes Franco-Italiennes, en particulier les vaillants officiers des divers groupes alpins, ces continuateurs des services géographiques, de l'œuvre ébauchée, il y a bientôt deux siècles, par la Blottière.

Nota
    Pour faciliter la lecture des descriptions de la Blottière. nous avons joint à ce mémoire le fac-simile réduit des dessins représentant la perte du Rhône et l'aqueduc souterrain de Touilles, qui accompagnent le manuscrit original. On trouvera aussi à la fin du volume, une reproduction à petite échelle de la rare et curieuse carte annexée aux "Mémoires militaires sur les frontières de la France, du Piémont et de la Savoie depuis l'embouchure du Var jusqu'au lac de Genève" attribués à de Bourcet et publiés à Paris et à Strasbourg, ou à Berlin, en l'an X.
    Cette carte dressée en grande partie d'après les données de celle de la Blottière ne peut être en aucune façon comparée avec la splendide carte géometrique du Haut-Dauphiné levée sous la direction de M de Bourcet de 1749 à 1754 et gravée en 9 feuilles (au 86.4000e) dont les tirages sont mis à la disposition du public par les soins du service géographique de l'armée.
    A la suite de chacun des noms de lieu dont la désignation ou l'ortographe ont subi des modifications un peu sérieuses depuis l'époque où la Blottière a rédigé son mémoire, on trouvera indiquée en lettres italiques et entre parenthèses son appellation moderne (1891) avec l'orthographe locale habituellement adoptée.
H. Duhamel
Transcription P. Surdon et C. Rochas